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Chroniques de réanimation
11 août 2011

Chroniques (1) - La mépronizine

 

Une importante nouvelle est passée inaperçue ces jours-ci : le retrait de l’autorisation de mise sur le marché de la Mépronizine dans le traitement des insomnies, en raison d’un rapport bénéfice/risque défavorable. Qu’à cela ne tienne, me direz-vous – et à juste titre - d’autres hypnotiques existent qui peuvent remplacer avantageusement ce médicament. Que nenni, mes amis ! En effet, ce médicament avait, jusqu’à ce jour, le grand avantage de distraire le réanimateur recevant la énième tentative de suicide lors de ces longues (ou courtes, c’est selon la façon dont on l’entend) nuits de garde. En effet, parmi les suicidés qui ont le sens pratique et qui utilisent ce que les laboratoires pharmaceutiques et les médecins mettent gracieusement à leur disposition (de moins en moins – gracieusement - il faut bien le dire), donc parmi ces suicidés-là, bien connus sous le sobriquet d’IMV, intoxication médicamenteuse volontaire pour les intimes, une catégorie d’entre eux utilisaient le médicament cité ci-dessus, afin de bénéficier au maximum de l’effet thérapeutique attendu, à savoir le sommeil. Or, si les autres hypnotiques n’induisent qu’un banal coma, rapidement pris en charge par une intubation oro-trachéale, une réhydratation et surtout l’attente du réveil, leur principal problème étant la recherche d’une place dans un service accueillant les patients ventilés, la Mépronizine avait cet indéniable charme de provoquer des troubles hémodynamiques sévères susceptibles de sortir, nuitamment, le médecin de sa léthargie. Les hypotensions artérielles sévères qu’elle induisait lors des IMV l’excitait suffisamment - surtout lorsqu’il était jeune, il faut bien le reconnaître – pour qu’il parte, Dr House des hôpitaux de banlieues, déterminer la part entre la vasodilatation artérielle et l’atteinte cardiaque, ce qui l’amenait à réaliser une échographie cardiaque, voire à poser une voie veineuse centrale pour mettre des catécholamines, ce qui remplissait l’interne qui le secondait d’une immense allégresse. Last but not least, la Mépronizine avait aussi cet immense avantage de n’avoir aucune corrélation biologico-clinique c’est-à-dire que le taux du médicament mesuré dans le sang ne permettait en rien de prédire la gravité des signes cliniques ni l’évolution pronostic. Oh désespoir ! Ce médicament, prescrit partout et pour tous, hautement toxique lorsqu’en excès et dont le dosage sanguin est aussi cher qu’inutile, était un pilier de l’enseignement de l’interne de réanimation, et ceci depuis des dizaines d’années. Et on voudrait le remplacer par d’autres hypnotiques moins dangereux ! Chers confrères, luttons contre cette ineptie, aussi brutale qu’inattendue, puisque le grief était connu depuis de nombreuses années, probablement en rapport avec la survenue récente d‘affaires autour de certains médicaments, et qui nous prive de ce parfait outil d’enseignement. Organisons la résistance et participons à la lutte des patients déboussolés qui dans les forums sur le net se désolent qu’on puisse les priver de cette molécule devenue indispensable à leur vie. Que vont faire les français, premiers consommateurs d'hypnotiques au monde, s'ils ne dorment plus la nuit? La révolution?

 

 

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